Second volet du Festival Chants d’Elles au P’tit Bar
Chloé Lacan : la divine rencontre.
Au milieu du public, dans la
salle comble et noyée d’obscurité, une voix féminine, accompagnée par des
claquements aux rythmes éloquents, vocalise à la tzigane. Et puis brusquement,
la silhouette juvénile de Chloé Lacan bondit dans le modeste carré lumineux de
la scène du P’tit Bar où bien sages l’attendent ses partenaires : un clavier stoïque comme un athlète sur la
ligne de départ d’un cent mètres et un accordéon à l’affût avec ses rangées de
boutons de nacre qui semblent la narguer.
Vêtue des couleurs de la passion,
le rouge et le noir, ses mèches brunes encadrant son visage aux yeux immenses,
elle enlace l’instrument quelque peu provocateur, et le combat commence. Lequel
des deux va dompter l’autre, va l’apprivoiser ?
Il suffit que l’artiste plaque
contre sa poitrine son partenaire, et, d’une main habile et légère, lui impose
un rythme lascif en lui tirant des soupirs de bien être pour comprendre qui
remportera l’affrontement.
L’accordéon retient son souffle,
geint de plaisir, multiplie ses notes avec extase, et pour peu que Chloé ajoute
les contre-pieds de sa dérision, le public est conquis. Son filet de voix
s’enfle et grandit, glisse et plonge le long de sa gorge, rebondit en accents
de Diva, cascade en torrents, avant de rejoindre le calme retrouvé de la
poésie, la sagesse partagée du clin d’œil complice.
Deux alexandrins pour souligner
les morsures du temps qui passe, chipés au grand Corneille qui valurent à
celui-ci une réponse irrespectueuse d’une jeune comédienne dont il était
irrémédiablement épris, offrent à Chloé l’occasion de présenter son troisième
partenaire, le modeste ukulélé, « modeste, mais c’est un instrument qui offre
bien des satisfactions pour peu qu’on sache le manipuler » reconnut la
chanteuse d’un air complice et faussement innocent, tout en interprétant l’un
des plus beaux textes de la soirée.
Et puis l’artiste décline,
toujours sur le même registre, ses états d’âme. Elle est jalouse mais ne
reconnait pas cette femme excessive. Solitaire mais pas sans plaisir. Elle
révèle avec les accents de Barbara que Blanche-Neige piccole. Sans cesse à la
pêche au bonheur, elle regagne les rives rassurantes comme un paquebot qui
rentre au port. Et lorsqu’au final, accompagnée de son ukulélé, elle replonge
dans l’obscurité de la salle en interprétant la jolie et douce chanson
autrefois présentée par Michel Simon qui avait aussi ses instants de poésie,
elle confie à son auditoire le plaisir heureux de prolonger cette mélodie en
ayant soudain retrouvé un monde où il se sent meilleur.
Sous une salve
d’applaudissements, Chloé est repartie. Mais l’assistance chante et la
redemande. Et comme Patrick et Manu qui n’avaient pas manqué de poser avec
esprit la question, le public s’inquiète déjà : Chloé, elle reviendra là quand
?
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